DU RESPECT S’IL VOUS PLAÎT !

Chers amis,

Votre détresse, votre désarroi, à tout instant, je les vis de l’intérieur  moi aussi ! Avec peine, mais cette très difficile situation ne m’entraîne pas à l’abattement et encore moins à la résignation ou à la démission face à l’adversité. Sinon je ne me dépenserais pas sans compter alors que rien ne m’y oblige et que je n’y ai d’autre intérêt que moral !

Oui tout me rappelle notre profession bafouée, désespérée: la multiplication des sites sociaux, les “live” faits par les uns et les autres, les propos haineux, les mails par dizaines que je reçois chaque jour, les courriers, les appels  les manifestations sur la voie publique “spontanées” (?) qui se précisent, celles qui ont eu lieu, les professionnels qui veulent ouvrir coûte que coûte … L’explosion est un exutoire, jamais un remède de fond.

Je mesure aussi l’attente anxieuse au travers des statistiques de visites sur notre site (plus de 1 500 parfois !) à la recherche d’infos, d’éclairage, de raison d’espérer, la recherche aussi d’explications pour ne pas  faire n’importe quoi, pour vraiment comprendre. Car il y a un solide bon sens et beaucoup d’intelligence dans la démarche du plus grand nombre et je me dis souvent “bravo, avec ce que le métier vit !” Je sens tout cela sur mes épaules et donc je fais, j’agis, j’écris, sans relâche, sans prêter attention à la méchanceté de ceux qui n’ont rien d’autre à faire partager. Dommage .  Votre sourde colère en même temps que votre confiance m’animent, heureusement !

Aujourd’hui une forme de désespoir prend le dessus sur certains et ce n’est pas bon mais c’est compréhensible, et  c’est légitime.

Hors – et souvent contre – nos actions professionnelles, des “initiatives épidermiques” éclatent avec en commun la colère qui s’y exprime, les discours enflammés et aveugles de leaders qui rappellent les débuts des gilets jaunes. Rappelez-vous : Eric Drouet le plus médiatisé (avec une barbe,mais elle était brune !), Ingrid Levavasseur l’aide-soignante rousse (mais elle n’a pas de barbe !), Jérôme Rodrigues et son oeil atteint, Maxime Nicolle et sa casquette à l’envers, Jacline Mouraud  adulée et rejetée par d’autres gilets jaunes (air connu, on n’aime pas la concurrence quand on “tient le haut de l’affiche”), Christophe Chalençon le forgeron du Vaucluse aux propos d’extrême droite … On connaît la suite .

Tous ces types de leaders, sous d’autres noms, commencent à apparaître sur nos radars des discothèques. Fruit de la culture des réseaux sociaux !  Fruit de la colère. Quand il n’y a plus d’espoir s’ouvrent les vannes de la désespérance. Cela ne mène à rien. Ne soyons pas dupes, ni manipulés.

Ce n’est pas parce qu’on est médiatisé qu’on a quelque chose à dire !

Là n’est pas l’important pour ces chefs autoproclamés : ils s’exposent, se montrent. Civilisation des egos partagés, recette de la télé-réalité où seul le partage en public “donne de la consistance” aux intervenants. Au delà ?… Au delà … à part un activisme débridé, qui est le contraire du dynamisme nécessaire,  je retiens la recette télévisuelle du moment: se mettre personnellement en scène pour enfin exister. On n’allait pas  laisser passer l’occasion !  Tout le monde danse avec les stars, tout le monde est Master chef ou super Nany. Je dis (parfois seulement) “chapeau les artistes”  mais il faut relativiser et voir les limites du discours de fond. 

S’y entremêlent les ingrédients classiques de l’intox: l’exploitation par le populisme du désarroi des autres.. Deux ficelles sont utilisées :

le populisme: dans cette variante de la démagogie, on flatte l’auditeur, on se met “à son niveau”, loin des discours institutionnels: “nous aussi on a une famille, des enfants, ma femme ci, ma femme là …”,  on tutoie ou donne des surnoms. On fait “simple”, on fait “peuple” pour être accessible. Une des déclinaisons du populisme s’exprime dans le copinage (la fraternisation) et le recours à l’humour facile qui “installe” une pseudo complicité avec l’auditeur : “bravo à un tel et à un tel pour leurs initiatives, on va faire comme vous, merci pour vos dons , bonjour Jeannot, t’es là toi aussi Crevette?, on va attendre que d’autres se connectent …on les énumère… il faut se rendre sympathique, montrer qu’on est une grande famille (souvent réduite à ses propres proches !). Dernier avatar “classique” (il y en a d’autres) du populisme: le vocabulaire pseudo “direct” toujours châtié et machiste  “j’en peux plus! vous m’emm… , ceux qui sont pas content n’ont qu’à … , vous êtes des”flipettes”, il faut “en avoir ou pas”, “c’est pas un concours de quéquettes…” (comme quoi on n’est pas à une contradiction près !) pour se poser en homme, en “vrai” (euh ?). Au besoin on manie l’injure et la vulgarité la menace même car transgresser c’est montrer son courage, non ? ! Facile  mais le populisme n’est pas une école très exigeante.

l’esbroufe : il faut faire rêver tel artiste m’a dit au téléphone que … j’ai vu tel ministre, tels députés etc … on ira à l’Elysée …” Il faut épater le gogo. On y joint la mise en scène d’opérations spectaculaires pour recueillir l’adhésion de l’auditeur: au bureau de vote du premier ministre, le ministre de la santé “alpagué” dans la rue, on a rendez-vous à la TV etc … mais aussi : “on a des avocats qui … ,  “on ira à Bruxelles…” (et quand aux fraises ?) Une des expressions de ce “tape à l’oeil” est le culte du pseudo mystère: “je ne peux pas tout vous dire,  je suis tenu pour que cela réussisse, au secret mais vous allez voir, je vais dans un lieu, je ne peux dire où etc…” il faut tenir en haleine et faire espérer un développement chimérique et mirifique. L’autre complément est le complotisme “en secret le gouvernement veut que… ils l’ont fait exprès, ils veulent faire mourir les discos etc…” qui victimise l’auditeur pour se le concilier. Ultime expression de l’esbroufe c’est la démonstration simpliste et l’affirmation péremptoire sans précision: “quand ils verront … on n’a rien fait jusqu’ici alors, nous, en faisant quelque chose, on obtiendra” pour montrer qu’on raisonne et qu’on a des neurones. Un des raisonnements primaires consiste à accuser l’autre et les syndicats. Grand moment de délectation facile où se déploie l’attaque personnelle la plus perfide (on a le courage qu’on peut, malgré tout !) : “Ils sont payés, achetés ou vendus …” (les versions peuvent différer) … ils  gagnent du fric, donc comment voulez-vous que … ” et pour parachever la démonstration (?!) “leur division nous fait du mal” sous entendu “nous on représente la profession unie, unanime ” cela donne confiance, non ?! A eux seuls ils représentent toute la profession, ce sont donc les meilleurs, non ? quelle démonstration ! … ou alors, plus marxiste : “les grosses discothèques s’y retrouvent mais nous les petits … ” pour révolter l’auditeur, l’innocente victime et ainsi ils taisent les multi fractures qu’eux-mêmes causent.  Opposer les uns aux autres, les petits aux gros est le meilleur moyen de “se poser” soi-même comme recours. Technique du bouc émissaire bien éculée mais ça marche toujours…chez certains, fragilisés en ce moment !  Comme on n’est pas trop regardant, on se refait une virginité à coup d’appels à l’unité (derrière eux, bien sûr !) celle là même qu’on a déchirée !

Je pourrais démonter en détail tous ces discours avec leurs règles fondamentales des bonimenteurs et des “meneurs populistes”.  J’ai juste tenu à l’illustrer objectivement à partir des faits et des propos tenus. Je ne vais pas me faire d’amis aujourd’hui, mais après tout:  il vaut sans doute mieux ! Ces acteurs improvisés, manipulateurs tirent le métier vers le bas. D’autant plus facile que ce métier est désemparé.

Cela me navre mais n’entame nullement ma détermination. Au contraire même, je me sens le devoir de résister et de m’opposer. Ils ne déboucheront que sur des impasses (ce qui ne veut pas dire que nous on va réussir mais au moins on fait tout pour !) et leur ego satisfait, on les verra disparaître sans demander leur compte. Hélas car ils sont en train d’alimenter la facture de déroutes qu’on devrait leur faire régler !

Bien amicalement à tous,

Courage à nous, on va gagner !

Patrick MALVAËS