ATTENTION A LA LETTRE DE LICENCIEMENT !

Bonjour,

En droit social, le danger se niche dans les détails.

En voici une illustration à laquelle on n’aurait pas pensé mais la chambre sociale de la Cour de Cassation est là pour illustrer la complexité de la pensée juridique française ! En clair il ne faut pas annoncer préalablement oralement à un salarié qu’on lui a envoyé une lettre de licenciement .

Il faut qu’il l’ait reçue … à lire donc !

Cordialement

Patrick MALVAËS

 

Un employeur a-t-il intérêt à annoncer verbalement l’envoi d’une lettre de licenciement?

La réponse est non. Il est imprudent d’annoncer, même par politesse, à un salarié l’envoi de sa lettre de licenciement, selon un arrêt de la Cour de cassation.

Car, faute de pouvoir prouver que la lettre a été expédiée avant cette information verbale, le patron se rend auteur d’un licenciement verbal, ce qui est toujours un licenciement abusif.

Un patron contestait sa condamnation à verser des indemnités de licenciement, des indemnités de préavis et des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Il avait au contraire envoyé une lettre de licenciement pour faute grave, ce qui est un licenciement sans préavis et sans indemnités. Après l’avoir envoyée,   il avait prévenu par téléphone l’intéressé afin de lui éviter de se présenter le lendemain et d’être congédié publiquement.

Mais, selon la loi, c’est la lettre de licenciement qui notifie le licenciement et en énonce les motifs, et elle doit être envoyée en recommandé avec accusé de réception. Il s’ensuit que le licenciement verbal n’est pas conforme à cette exigence.

De plus, relevaient les juges, comme le licenciement est prononcé pour l’employeur au moment de l’envoi de la lettre, il faut alors prouver que l’appel téléphonique a bien été postérieur à l’envoi, preuve qui n’était pas possible d’apporter.

Dès lors, les juges ont considéré, dans l’intérêt du salarié, que l’information verbale avait été antérieure à la notification dans les formes légales et que cette pratique revenait à licencier sans motif, ce qui caractérise le licenciement abusif.

(Cass. Soc, 3.4.2024, H 23-10.931).

 

Peut-on par correction prévenir un salarié de son licenciement par téléphone ?

Publié le 23 mai 2024 – Direction de l’information légale et administrative (Premier ministre)

Éric est salarié d’une entreprise. Une procédure de licenciement à son encontre est en cours. L’employeur prend la décision de notifier à ce salarié un licenciement pour faute grave par courrier recommandé. Cependant, en parallèle, il prévient Éric le même jour par téléphone afin de lui éviter de se voir congédier en présence de collègues rassemblés pour la tenue d’une réunion. L’employeur prend-il un risque à agir de la sorte ?

Service-Public.fr vous répond : 

Le licenciement pour faute grave prive le salarié de ses indemnités de licenciement et de l’indemnité compensatrice de préavis. Ce motif entraîne une rupture du contrat de travail sur le champ. La rupture du contrat est effective à la date d’envoi du courrier. Cela peut avoir pour conséquence un décalage entre le moment de la rupture effective du contrat et le moment de la prise de connaissance de cette rupture par le salarié.

Conformément aux termes de l’article L1232-6 du code du travail, l’employeur doit notifier sa décision de licencier par lettre recommandée avec avis de réception. La lettre de licenciement doit comporter l’énoncé du ou des motifs invoqués par l’employeur.

Dans une affaire similaire, les juges ont suivi la voie déjà tracée par les textes et la jurisprudence existante. Ils ont retenu que l’appel téléphonique au salarié constituait un licenciement verbal (et donc sans cause réelle et sérieuse), même si un courrier de licenciement pour faute grave avait été envoyé le même jour. En effet, la chronologie exacte des évènements n’était pas établie.

Les juges n’ont pas non plus retenu l’intention louable de l’employeur.

En conclusion, la notification d’un licenciement doit se faire par écrit. Même par correction ou avec une bonne intention, il n’est pas recommandé d’informer le salarié de la rupture de son contrat par téléphone avant d’avoir envoyé la lettre de licenciement.