Chers amis, chers confrères,
Peut-être plus que d’autres, notre Pays affronte un regain de crise sanitaire sévère qui fauche la vie de nombreux citoyens et en menace d’autres durablement.
Cette réalité objective commande une attitude responsable et déterminée et une mobilisation de TOUS.
Deux interventions publiques m’ont donc particulièrement choqué par leur caractère tout à fait inapproprié.
1°) Je ne trouve pas que les propos récents du Premier Ministre, Jean Castex, soient de nature à rassurer et mobiliser.
Ses distinctions entre “commerces essentiels ou non” (!!!) sont vaines et inopérantes, inutilement choquantes.
Son catastrophisme (“les commerces resteront sûrement fermés après le 1er décembre”, “Ce n’est pas le moment de desserrer la bride !”) n’est pas un raisonnement acceptable.
Car il est frappé du sceau de l’hésitation, de l’approximatif, de la volonté de ménager la chèvre et le chou.
Propos inaudibles au delà de vaines espérances qu’ils nourrissent !
Soit on affirme clairement la situation et les mesures prises pour y répondre et on s’y tient, et là on est crédible.
Mais laisser entendre des lendemains moins douloureux, c’est-à-dire semer des espoirs incontrôlés, et 15 jours plus tard annoncer un tour de vis maintenu, voire renforcé, n’est pas recevable et la grogne répond logiquement à ce qui est ressenti comme de la morgue ou du mépris.
La situation de tous les commerçants de France est si tendue qu’ils ne sont pas en capacité d’entendre ces discours à géométrie variable.
Le seul discours qui vaille est un discours de vérité et de mobilisation générale, un discours fiable et vrai qui entraîne la confiance. Ce n’est pas le cas.
Le plus grave est que la parole publique est déjà entachée de suspicion depuis l’origine de cette pandémie où on a trop menti aux Français (c’est une grippe, on a les masques, etc …).
Le Premier Ministre aurait dû tenir compte de ces erreurs passées récentes et donc éviter les atermoiements actuels.
Il valait sans doute mieux déclarer ” la situation est gravissime, nous devons tous faire un effort continu et durable. Il n’y a pas le choix”.
En appeler, en conséquence, à tourner le dos aux intérêts personnels et catégoriels au nom de l’intérêt collectif, suprême de la Nation aurait été mieux venu.
Promettre comme l’a fait en son temps Sir Winston Churchill “du sang, de la sueur et de larmes” eût été plus courageux que ce comportement “à la petite semaine”.
Car s’il s’agit bien d’une guerre -et je crois que c’en est une- il faut entraîner la nation toute entière dans l’effort et faire fi des revendications catégorielles.
Le Premier Ministre est victime des atermoiements passés et des siens, bien présents.
La lutte contre la pandémie, c’est INDISCUTABLE passe par ce langage de vérité et de courage.
Parallèlement, il faut mettre en place les mesures d’aides et de soutien sans tergiverser ni mégoter non plus.
En particulier notre appareil productif et commercial doit être sauvé pour ne pas insulter l’avenir. Le “saupoudrage” actuel n’est pas à la hauteur.
Si on nous parlait ainsi, nous, citoyens, chefs d’entreprises nous ne cèderions pas alors à la tentation de ne voir que nos “petits intérêts” au jour le jour.
Les Français et les chefs d’entreprises sont adultes et responsables.
J’en viens à mon second sujet de colère…
2°) J’assiste ces jours-ci, comme tout le monde, aux protestations catégorielles en tous domaines. Je les comprends mais ….
Mais enfin, de quoi parle-t-on alors que des milliers de vies sont en jeu ? De son confort personnel comme si la mort ne rôdait pas à côté ? De tiroirs-caisses ?!
Il y a de la trivialité là-dedans même si on l’habille des oripeaux des bons sentiments et de raisonnements fumeux où se mêlent économie, social, psychologie …
Je sais la souffrance de chacune et chacun sur tous les plans et je lutte pour aider mon métier le plus possible, et tous ses professionnels.
L’habillage ne cache pas notre individualisme forcené qui n’est pas de mise dans la crise actuelle.
Simplement, il se nourrit de la faiblesse et de la versatilité des dirigeants.
Le manque de capacité d’analyse de fond de certains, plus soucieux de plaire que d’être dans le vrai, fait le reste. Pitoyable.
Personnellement, je suis viscéralement attaché à nos métiers, à leur défense. Je l’ai largement prouvé.
Pour autant je ne saurais cautionner des intervenants professionnels qui DANS LE CONTEXTE ACTUEL (dans un autre, ce serait autre chose) parlent de réouverture des discothèques en suivant des protocoles dont on sait bien qu’ils sont inapplicables. Du fait des comportements déviants, du fait de la lourdeur des dits protocoles et -réfléchissons cinq secondes- des impératifs de rentabilité qui sont la pierre angulaire de toute activité économique !
Et puis rouvrir en mode dégradé n’apportera aucune solution viable, enfin, dans ce contexte national. C’est clair. Le taire, c’est mentir.
Nous ne pouvons ACTUELLEMENT, parler de réouverture et de protocoles ! C’est irresponsable d’autant que cela n’a aucune chance de prospérer.
Et pourtant, je viens encore de l’entendre dans la bouche d’un syndicaliste professionnel !
Et bien, je dis non ! On ne sème pas de vains espoirs dans la désespérance, c’est ajouter inutilement à la souffrance.
C’est abuser des gens désorientés dans une détresse économique, morale et psychologique sans précédent.
Allons, cependant, jusqu’au bout de ce type de “raisonnement” (?!),imaginons la mise en pratique de ce protocole miracle tant évoqué par certains depuis des mois.
L’autorisation d’accueil (la jauge) serait limitée, évidemment très inférieure aux capacités réelles d’accueil. Combien de clients ?
Le seuil de rentabilité -oui ça existe- dépend en premier lieu de ce paramètre incontournable.
Ensuite, nous serions soumis à des contrôles drastiques sur le respect strict du protocole sanitaire.
Comment le faire respecter scrupuleusement à des dizaines/centaines de personnes en fête ?
Nous ne résisterions à aucun contrôle, soyons un peu sérieux et lucides !
Nous ferions l’objet de sanctions et fermetures administratives alors que plus aucune aide ne serait, alors, possible !
Voilà où peuvent conduire ces raisonnements irresponsables. J’ajoute que l’absence de raisonnement économique est pathétique…
Comment peut-on gérer, ou conseiller, une entreprise dans ces conditions ?!.
Jamais le SNDLL ne conduira nos exploitants vers de telles aventures.
Le plus grave est de retrouver ces propos dans la bouche de “syndicalistes” !
Je m’y refuse.
La situation est suffisamment difficile pour ne pas jouer aux apprentis sorciers. Je ne vous mentirai jamais.
Les établissements de nuit bénéficient actuellement -même si c’est insuffisant et insatisfaisant pour certains et c’est vrai- de mesures d’accompagnement dont il faut dans un premier temps nous féliciter ou du moins nous contenter.
Quitte à les affiner, les améliorer. Nous nous y employons sans relâche. C’est cela l’engagement actuel du SNDLL.
Je le rappelle haut et fort, même si cela me vaudra une volée de bois vert de jusqu’au boutiste. J’ai toujours, personnellement, tenu le langage rude et abrupte de la vérité car, comme je l’ai dit plus haut, la vérité me paraît seule à même de fédérer dans l’effort collectif, de rassurer au niveau individuel.
Il est de situations où il est de l’honneur d’une profession et de chefs d’entreprises responsables de soutenir la Nation.
Sans elle, nous ne serons plus rien. Donc, prenons notre part du fardeau. Et avançons. Ensemble. Lucides et déterminés.
Vaincre est un devoir,
Amitiés à tous,
Patrick MALVAËS